Solo de William Boyd: l'agent 007 en réanimation
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L'écrivain britannique William Boyd réinvente James Bond dans Solo, l'un des romans les plus attendus cette année. L'agent 007 doit se rendre dans un petit pays d'Afrique où une guerre civile perdure. Nous sommes en 1969. La mission : rétablir la paix au nom de Sa Majesté la reine.
La première mission Solo est pour l'auteur William Boyd. Quatorze romans et plus de soixante millions d'exemplaires plus tard, il doit redonner vie au personnage de légende créé par Ian Fleming de 1953 à 1966. Un mandat casse-gueule.
La seconde mission est pour le célèbre espion britannique: partir au Zanzarim (un pays fictif d'Afrique) et se diriger vers la région du Dahum où, à la suite de la découverte d'un riche gisement de pétrole, les habitants se sont soulevés pour faire sécession. Bond doit s'y rendre en pleine guerre civile et trouver le moyen de neutraliser le chef des insurgés pour mettre fin aux troubles. Vainqueur, mais trahi, il en reviendra inconscient et blessé, à la suite de quoi Bond va entreprendre une mission en solitaire avec pour seul but, la vengeance.
Il y a un petit côté vieillot dans le roman. Certes, l'histoire prend place en 1969, en dehors des dictats des réseaux sociaux et de toute forme de technologies qui animent inéluctablement nos vies contemporaines. Cette situation temporelle se comprend très bien, mais c'est le reste qui fait vieillot. Une trame narrative linéaire, sans surprise, sans retournement... Un Bond fait homme, ordinaire, pratiquant un métier dangereux, mais sans risque. On est face à un 007 calculateur, plus roublard qu'imaginatif, exerçant froidement une violence pas toujours justifiable.
Très descriptif, ce polar est presque une autopsie de la légende Bond, à l'opposé des scènes d'actions pétaradantes qui éblouissent les ogres du grand écran. On y retrouve bien sûr toute le prêt-à-porter de l'agent du MI6! Un dandy gastronome qui cache un espion ayant le pouvoir de donner la mort, tombeur de ces dames, amoureux des belles voitures, amateur d'alcool et fumeur invétéré. Mais le ton du roman est dénué de toute passion et le personnage comme ses aventures en souffrent. Tout respire une époque qui n'est plus nôtre. Cette odeur de renfermé ne trompe pas. Par ailleurs, si on remplace le nom de James Bond par, disons, Robert Tremblay, on se trouve devant un roman d'espionnage trop appliqué, qui se démarque bien peu de la production actuelle.
L'impression qui persiste est que William Boyd s'est senti paralysé par son trop célèbre personnage. Il n'aura pas réussi à le mettre à sa main, comme s'il avait laissé Ian Fleming guider son esprit et sa créativité. Mais le créateur de James Bond est mort depuis longtemps. Bien que Boyd soit un écrivain accompli, la commande des héritiers Fleming était lourde. La mission solo est remplie, mais ce ne sera pas suffisant pour redonner un second souffle à un personnage rongé jusqu'à la moelle par Hollywood.
William Boyd, Solo, Éditions Du Seuil. Traduit de l'anglais par Christiane Besse (Solo, 2013). Avril 2014. 342 pages. Aussi disponible en version électronique.
Publication sur Huffington Post Québec: 18/05/2014 09:02